Un employeur peut-il prononcer une sanction disciplinaire qui n’est pas prévue par le règlement intérieur ?

Non !

Le règlement intérieur est un document écrit par l’employeur et obligatoire dans toutes les structures employant au moins 50 salariés. Il a pour objectif de lister les droits et obligations des salariés dans l’entreprise et doit être conforme aux dispositions légales, réglementaires et conventionnelles applicables au sein de la structure. Il doit notamment comporter les dispositions suivantes :

  • les mesures relatives à la santé et sécurité dans l’entreprise ;
  • les dispositions relatives aux droits de la défense des salariés ;
  • les règles relatives aux harcèlement moral et sexuel et au agissements sexistes ;
  • les conditions dans lesquelles les salariés peuvent être appelés à participer, à la demande de l’employeur, au rétablissement des conditions de travail protectrices de la santé et la sécurité des salariés lorsqu’elles apparaissent comprises ;
  • les règles générales et permanentes relatives à la discipline, notamment la nature et l’échelle des sanctions que peut prendre l’employeur ;
  • etc.

Le règlement intérieur doit impérativement mentionner les différentes sanctions pouvant être prononcées à l’encontre d’un salarié qui commettrait une faute. Généralement, les sanctions sont classées par ordre de gravité dont les suivantes: l’avertissement ou le blâme écrit, la mise à pied disciplinaire, la mutation, la rétrogradation et le licenciement disciplinaire.

Du fait de son pouvoir disciplinaire, l’employeur dispose d’une certaine autonomie dans la fixation du barème des sanctions. Il peut ainsi prévoir des sanctions autres que celle fixées par la circulaire ou au contraire exclure certaines d’entre elles.

En revanche, l’employeur ne peut inclure dans le règlement intérieur des sanctions :

  • contraires aux lois, règlements, conventions ou accords collectifs applicables dans l’entreprise ;
  • pécuniaires ;
  • non respectueuses du droit des personnes et des libertés individuelles ou collectives ;
  • discriminatoires ;
  • exemptes de la procédure disciplinaire.

Par ailleurs, l’employeur est tenu de respecter les dispositions du règlement intérieur relatives aux sanctions disciplinaires. En effet, il ne peut prendre une sanction plus sévère que celle prévue par le règlement intérieur, ni prononcer une sanction disciplinaire autre que celles prévues dans ce document, sauf en cas de licenciement. A défaut, la sanction peut être annulée.

C’est ce qu’a rappelé la Cour de cassation dans un arrêt en date du 2 décembre 2020.

En l’espèce, un salarié avait agi en justice pour demander l’annulation des sanctions disciplinaires dont il avait fait l’objet et le paiement d’une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. Il soutenait qu’une sanction disciplinaire ne pouvait être prononcée par un employeur employant habituellement au moins 50 salariés que si elle est prévue par le règlement intérieur. Or l’employeur n’avait pas établi un règlement intérieur alors qu’il était soumis à cette obligation compte tenu de l’effectif de la structure. Les juges du fond avaient rejeté les demandes du salarié en retenant que les sanctions prononcées étaient justifiées. Ils avaient retenu que ce n’était que lorsque le règlement intérieur fixait la nature et l’échelle des sanctions que l’employeur était privé de la possibilité de prononcer une sanction disciplinaire qui n’est pas prévue par ce règlement. Dans cette affaire, ces points n’étaient pas fixés puisque la structure ne disposait pas de règlement intérieur. Le salarié avait formé un pourvoi en cassation pour contester la décision des juges.

La Cour de cassation a censuré la décision des juges en retenant qu’une sanction ne peut être prononcée contre un salarié par un employeur employant habituellement au moins 50 salariés que si elle est prévue par le règlement intérieur. A défaut, la sanction peut être considérée comme nulle.

Par ailleurs, pour que l’employeur puisse se prévaloir des dispositions prévues par son règlement intérieur, il doit respecter la procédure de dépôt et de publicité. En effet, l’employeur doit soumettre le projet de règlement aux membres du Comité social et économique (CSE) pour avis. Ensuite, le projet de règlement ainsi que l’avis du CSE doivent être transmis à l’inspection du travail. Un exemplaire du règlement doit être déposé au greffe du conseil de prud’hommes. Il doit être communiqué et porté à la connaissance des salariés. Il doit indiquer sa date d’entrée en vigueur qui peut être prévue au moins un mois après l’accomplissement de la dernière formalité de dépôt et de publicité.

Si cette procédure de dépôt et de publicité n’est pas respectée, l’employeur ne peut pas s’en prévaloir. Ainsi, la sanction prononcée sur la base du règlement peut être contestée et annulée.

Consulter la décision de la Cour de cassation du 2 décembre 2020 : https://urlz.fr/eGeq