L’absence injustifiée et prolongée d’un salarié caractérise-t-elle une volonté de démissionner ?

Non !

La démission désigne l’acte par lequel un salarié, en contrat de travail à durée indéterminée (CDI), fait connaître à son employeur sa décision de mettre fin à son contrat de travail. Un salarié peut manifester sa décision de rompre son contrat de travail à tout moment, y compris pendant les périodes de suspension de son contrat.

Sauf disposition conventionnelle contraire, aucune procédure légale n’est imposée pour signifier une démission. Le salarié peut prévenir l’employeur par oral ou écrit, en lui adressant une lettre de démission, sans être tenu de motiver sa décision.

Pour être effective, la démission doit respecter certaines conditions. Le salarié doit manifester de façon claire et non équivoque sa volonté de mettre fin au contrat de travail auprès de son employeur. La démission ne se présume pas. Ainsi, une absence injustifiée ou un abandon de poste du salarié ne peut en aucun cas être considéré comme une démission. Le fait pour un employeur de sortir un salarié en absence injustifiée de l’effectif de l’entreprise en considérant qu’il est démissionnaire l’expose à une requalification en licenciement sans cause réelle et sérieuse. Il peut être condamné à payer au salarié les indemnités afférentes.

C’est ce qu’a rappelé la Cour de cassation dans une arrêt en date du 25 novembre 2020.

En l’espèce, un salarié avait refusé de participer à une réunion et ne s’était plus présenté à son poste de travail sans justification, malgré plusieurs mails de relance de l’employeur. Ce dernier avait alors cessé de lui fournir du travail et verser une rémunération en estimant que le salarié avait démissionné. Le salarié avait intenté une action en justice afin d’obtenir la reconnaissance d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse. Il soutenait que son absence prolongée, son refus de participer à une réunion ou la menace d’une éventuelle démission exprimée auparavant ne suffisaient pas à caractériser la volonté claire et non équivoque de démissionner. Les juges du fond avaient rejeté les demandes du salarié en retenant que ses absences face aux injonctions de l’employeur de reprendre le poste de travail caractérisaient bien une volonté claire de rompre la relation contractuelle. Par ailleurs, ils retiennent que le salarié avait attendu deux ans avant de réagir au fait que l’employeur ne lui fournissait plus de travail et ne lui versait plus de rémunération.

La Cour de cassation a censuré et annulé la décision des juges du fond. Elle a rappelé que la démission ne se présume pas mais qu’elle doit résulter d’un acte clair et non équivoque du salarié à mettre fin au contrat de travail. Ainsi, le fait de ne plus se présenter à son poste de travail sans fournir d’explications pendant deux ans, ne caractérise pas une telle volonté.

De ce fait, l’employeur ne peut, en aucun cas, présumer la démission d’un salarié en cas d’absences injustifiées même si elles sont prolongées. Pour sanctionner l’abandon de poste et les absences injustifiées, l’employeur doit respecter la procédure disciplinaire. Ainsi, il doit demander au salarié de justifier ses absences et/ou reprendre son poste de travail. A défaut de réponse du salarié, l’employeur doit le convoquer à un entretien préalable à une éventuelle sanction disciplinaire pouvant aller jusqu’au licenciement, par lettre recommandée avec accusé de réception ou remise en main propre contre décharge. La convocation devra mentionner :

  • l’objet de l’entretien ;
  • la date, l’heure et le lieu de l’entretien ;
  • la possibilité pour le salarié de se faire assister lors de l’entretien (par la personne de son choix appartenant à l’entreprise ou, en l’absence de représentants du personnel, par un conseiller du salarié).

L’entretien doit avoir lieu au moins de 5 jours ouvrables après la présentation au salarié de la lettre de convocation. Si le délai expire un samedi, dimanche ou jour férié, il doit être prorogé au jour ouvrable suivant.

A l’issue de l’entretien, et même si le salarié ne s’y présente pas, l’employeur peut lui notifier son licenciement. La notification devra se faire par lettre recommandée avec AR au moins 2 jours ouvrables après la tenue de l’entretien.

Consulter la décision de la Cour de cassation du 25 novembre 2020 : https://urlz.fr/eujv