Comment un employeur peut-il contester l’utilisation des heures de délégation d’un salarié titulaire d’un mandat de représentation du personnel ?

Un employeur est tenu d’organiser des élections professionnelles pour mettre en place un Comité social et économique (CSE) dès lors que l’effectif de la structure est d’au moins onze salariés pendant douze mois consécutifs.

Lorsqu’il est mis en place, les membres du CSE dispose d’heures de délégation pour assurer l’exercice de leur mandat de représentation du personnel. Le nombre d’heures de délégation dépend de la taille d’effectif de la structure et du nombre d’élus Article R.2314-1 du Code du travail. Ainsi, le temps consacré par les représentants du personnel à l’exercice de leur mandat s’impute sur leur contingent d’heures de délégation.
Les heures de délégation sont considérées de plein droit comme du temps de travail effectif et rémunérées comme tel à l’échéance normale de la paie. L’employeur ne peut pas mentionner dans le bulletin de paie les heures de délégation du salarié. Il doit les faire figurer dans un document annexe.

Par ailleurs, l’employeur ne peut pas refuser le paiement des heures de délégation même s’il estime qu’elles n’ont pas été utilisées conformément à leur objet sous peine de commettre un délit d’entrave. Il en est de même s’il conteste l’utilisation des heures de délégation en dehors du temps de travail du salarié ou le paiement d’heures supplémentaires à ce titre, si les nécessités du mandat le justifient.
En effet, si l’employeur souhaite contester l’utilisation des heures de délégation par le représentant du personnel, il doit d’abord les payer à l’échéance normale de la paie et saisir le conseil de prud’hommes pour que ce dernier statut sur ces contestations. Il ne peut pas faire une retenue sur le salaire ou refuser de payer les heures de délégation qu’il conteste de lui-même. Il doit saisir le juge pour cela. L’employeur doit d’abord demander en amont au salarié des précisions sur l’utilisation du crédit d’heures de délégation. Si le salarié refuse d’apporter des précisions ou fournit des justificatifs que l’employeur estime douteux, il peut alors agir en justice pour demander le remboursement de ces heures.
Les juges statuent sur l’utilisation des heures de délégation avec les précisions apportées par le salarié concerné.

Dans un arrêt en date du 5 avril 2023, la Cour de cassation a rappelé et précisé les conditions et modalités de contestation du paiement des heures de délégation par l’employeur.
En l’espèce, un employeur avait demandé à un salarié détenant des mandats de représentation des précisions sur l’utilisation des heures de délégation toutes utilisées en dehors de son temps de travail. Estimant n’avoir pas eu des explications détaillées, il avait saisi la juridiction prud’homale en référé pour contester l’utilisation des heures de délégation du représentant du personnel en dehors de son temps de travail. Il demandait d’enjoindre au salarié, sous astreinte, de préciser les dates et heures de délégation, d’indiquer les activités exercées durant ces heures et de justifier les nécessités du mandat l’obligeant à utiliser l’intégralité des heures de délégation en dehors de son temps de travail. Le salarié contestait la compétence du juge des référés.

Dans sa décision, la Cour de cassation a rappelé et précisé les conditions et modalités de contestation de l’utilisation des heures de délégation.
Elle rappelle « les heures de délégation considérées de plein droit comme temps de travail, qu’elles soient prises pendant ou hors les heures habituelles de travail, doivent être payées à l’échéance normale et que l’employeur ne peut saisir la juridiction prud’homale pour contester l’usage fait du temps alloué aux représentants du personnel pour l’exercice de leur mandat qu’après l’avoir payé ».

La Cour précise la compétence de la juridiction prud’homale et modalités de contestation :

  • « si l’employeur ne peut exiger devant le juge des référés la justification de l’utilisation des heures de délégation, il peut saisir avant contestation cette juridiction pour obtenir du salarié des indications sur cette utilisation ». La Cour retient que le juge des référés est compétent pour ordonner au salarié d’indiquer les activités au titre desquelles il a pris les heures de délégation. En revanche, le juge des référés ne peut pas ordonner au salarié de justifier l’utilisation détaillée des heures de délégation ;
  • si la charge de la preuve des nécessités du mandat l’obligeant à utiliser ses heures de délégation en dehors de son temps de travail pèse sur le salarié, l’employeur ne peut saisir le juge des référés pour obtenir la justification par le salarié de ces nécessités. Ainsi, si l’employeur doute que les nécessités du mandat justifient l’utilisation des heures de délégation en dehors du temps de travail, il devra saisir le conseil de prud’hommes qui statue au fond et non pas la formation en référé ;

Consulter l’arrêt de la Cour de cassation du 5 avril 2023 : https://urlz.fr/n6Dl

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