Un employeur peut-il consulter le disque dur de l’ordinateur d’un salarié intitulé « données personnelles » ?
Oui !
Les fichiers créés par un salarié sur son lieu de travail avec les outils mis à sa disposition par son employeur sont présumés avoir un caractère professionnel. Ainsi, un employeur est en droit de les consulter librement à tout moment et même en l’absence du salarié.
Néanmoins, tout salarié a droit, pendant et sur son lieu de travail, au respect de sa vie privée. Ainsi, tous documents ou fichiers identifiés comme étant « personnels » par un salarié, même s’ils sont créés à l’aide d’un outil mis à sa disposition par son employeur, ne peuvent être consultés par ce dernier. Un employeur ne pourra consulter ces documents, sauf cas d’urgence, qu’en présence du salarié ou qu’après que ce dernier ait été dûment appelé. Pour cela, un salarié doit identifier ses fichiers ou documents de façon claire comme étant personnels. Ne sont pas considérés comme personnels les documents portant le nom du salarié, contenus dans un dossier dénommé « mes documents » ou « confidentiel ».
La dénomination personnelle donnée au disque dur ne peut conférer un caractère personnel à l’intégralité des données qu’il contient.
Par une décision rendue le 22 février 2018, la Cour européenne des droits de l’Homme (CEDH) a validé la position de la Cour de cassation en retenant que la dénomination « données personnelles » d’un disque dur ne suffit pas à conférer à l’ensemble des données contenues un caractère privé. Ainsi, la consultation du contenu du disque dur par l’employeur ne porte pas atteinte au droit au respect à la vie privée du salarié.
En l’espèce, un salarié avait été licencié en raison du contenu de son disque dur qu’il avait dénommé « données personnelles ». Il a saisi la justice pour contester son licenciement en soutenant que l’employeur ne pouvait pas consulter le contenu du disque dur identifié comme personnel sans sa présence, ni le sanctionner en raison de son contenu. La Cour de cassation, validant la décision des juges du fond, a rejeté la demande du salarié. Elle a considéré que la dénomination donnée au disque dur lui-même ne pouvait suffire à conférer un caractère privé à toutes les données y figurant. Le salarié a saisi la CEDH pour contester la décision de la Cour de cassation en faisant valoir qu’une atteinte a été portée à sa vie privée.
La CEDH a rejeté sa demande en rappelant qu’une restriction au droit au respect de la vie privée d’un salarié peut être justifiée par les intérêts légitimes de l’employeur. En effet, ce dernier peut « légitimement s’assurer que ses salariés utilisent les équipements informatiques qu’il met à leur disposition pour l’exécution de leurs fonctions en conformité avec leurs obligations contractuelles et la règlementation applicable ». Ainsi, un employeur a un intérêt légitime à assurer le bon fonctionnement de l’entreprise, en mettant en place des mécanismes qui lui permettent de vérifier que ses salariés accomplissent leurs tâches professionnelles de manière adéquate et avec la célérité requise.
La Cour retient également que le droit français contient des dispositifs visant à protéger la vie privée des salariés puisqu’un employeur ne peut consulter les fichiers identifiés comme personnels, sauf risque ou évènement particulier, qu’en leur présence. Elle retient que les juridictions internes ont bien respecté et appliqué ce principe en vérifiant si la dénomination utilisée par le salarié répondait à ces critères. Il a été retenu par les juges que la dénomination « données personnelles » d’un disque dur ne confère pas un caractère privé à tout son contenu.
Consulter l’arrêt de la CEDH du 22 février 2018 : http://urlz.fr/6Jrh
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