Comment mettre en œuvre l’accord de branche prévoyant l’annualisation du temps de travail dans les entreprises de moins de onze salariés?

Afin de permettre aux entreprises de moins de 11 salariés équivalents temps plein (ETP) de recourir au dispositif d’aménagement du temps de travail sur l’année, la Fédération du service aux particuliers (FESP) a signé, le 13 octobre 2016, un accord sur l’aménagement du temps de travail au sein de la branche des services à la personne (Sap). Cet accord permet, pour les entreprises de moins de 11 salariés d’annualiser la durée de travail de leurs salariés sans avoir à négocier un accord d’entreprise.

Pour rappel, l’annualisation du temps de travail permet à l’employeur de s’engager sur une durée de travail annuelle et ainsi répartir la durée du travail, dans le respect des plages d’indisponibilité du salarié, sur une période de référence annuelle, afin d’adapter le rythme de travail des salariés à l’activité irrégulière de l’entreprise. Cette annualisation doit forcément passer par l’application d’un accord de branche étendu ou par la négociation d’un accord d’entreprise.

L’accord de branche du 13 octobre 2016 relatif à l’aménagement du temps de travail a été étendu par un arrêté du 28 juin 2021, publiée au Journal Officiel du 28 juillet. Il est donc officiellement et juridiquement applicable à toutes les entreprises de la branche.

Ainsi, une entreprise de SAP qui souhaite annualiser la durée de travail de ses salariés peut choisir d’appliquer l’accord de branche relatif à l’annualisation du temps de travail au sein de sa structure et ainsi ne pas avoir à négocier un accord d’entreprise. Pour cela, l’employeur devra notamment :

  • prévoir l’application de cet accord par une décision unilatérale. Il devra définir la période de référence annuelle correspondant soit à l’année civile, du 1er janvier au 31 décembre, soit à la période de l’exercice comptable de l’entreprise sans que celle-ci ne puisse excéder 12 mois ;
  • en avoir préalablement échangé collectivement avec l’ensemble des salariés concernés. Il conviendra de remettre aux salariés la décision unilatérale prévoyant l’application de ce dispositif ;
  • procéder à la signature des avenants aux contrats de travail des salariés en poste avant l’application de cet accord et adapter les modèles des contrats de travail des nouveaux salariés ;
  • transmettre aux salariés une note explicative de la gestion des absences dans le compteur d’heures ;
  • etc.

Lorsqu’il est mis en place, cet accord est applicable à tous les salariés de l’entreprise en contrat de travail indéterminée (CDI) ou à durée déterminée (CDD) de plus d’un mois qui interviennent au domicile des clients, qu’ils soient embauchés à temps plein ou à temps partiel. Il ne s’applique néanmoins pas pour les CDI intermittents, ni pour les salariés mis à disposition pour une durée déterminée.

Lorsqu’il en prévoit l’application, l’employeur doit mettre en vigueur toutes les dispositions prévues par cet accord de branche en matière de rémunération, décompte et modalités de suivi du temps de travail des salariés par des compteurs individuels, etc.

Toutefois, l’accord de branche du 13 octobre 2016 est étendu sous certaines réserves de l’application de certaines mesures prévues par l’arrêté d’extension du 28 juin 2021.

En effet, l’arrêté du 28 juin contient notamment les réserves suivantes quant à l’extension de l’accord de branche :

  • l’article 5.1 de l’accord relatif au lissage de la rémunération prévoit que « la rémunération mensuelle est lissée sur la base de la durée annuelle de travail prévue au contrat, de façon à assurer une rémunération stable et régulière, indépendante de la variation de la durée réelle travaillée pendant le mois, sauf en cas d’absences non légalement rémunérées (telles que les congés sans solde) ».
    Cet article est étendu sous réserve de la rémunération des congés payés annuels et des jours fériés chômés si leur rémunération est prévue par une disposition conventionnelle ;
  • l’article 6 de l’accord prévoit qu’un compteur individuel doit être tenu pour chaque salarié et faire apparaître pour chaque mois de travail certaines informations (le nombre d’heures mensuelles contractuelles, le nombre d’heures de travail effectif réalisées et assimilées, l’écart entre le nombre d’heures de travail effectif réalisées et celui prévu pour la période d’annualisation, etc.).
    Cet article est étendu sous réserve de l’application des dispositions de l’article D.3171-8 du Code du travail qui imposent un décompte quotidien et hebdomadaire des heures travaillées en cas d’horaires non collectifs. En effet, cet article prévoit que pour les salariés ne travaillant pas selon le même horaire collectif de travail affiché, leur durée de travail est décomptée :

    • quotidiennement, par enregistrement, selon tous moyens, des heures de début et de fin de chaque période de travail ou par le relevé du nombre d’heures de travail accomplies ;
    • chaque semaine, par récapitulation selon tous moyens du nombre d’heures de travail accomplies par chaque salarié.
  • l’article 8 de l’accord prévoit que « les périodes non travaillées en raison d’absences et congés non légalement rémunérés par l’employeur font l’objet d’une retenue sur la paie du salarié à hauteur du nombre d’heures d’absence constatée et d’une déduction ou d’une valorisation du compteur d’heures tel que décrit dans la notice explicative ». Il prévoit également les modalités de calcul des heures à déduire.
    Cet article est étendu sous réserve du respect de l’arrêt de la Cour de cassation (13 juillet 2010, n° 08-44550) s’agissant de l’impact de l’absence d’un salarié malade en période haute de modulation sur le seuil de déclenchement des heures supplémentaires ou complémentaires. Cet arrêt prévoit que, sauf dispositions conventionnelles plus favorables, le seuil de déclenchement des heures supplémentaires applicable en cas de modulation annuelle du travail doit, lorsque le salarié est absent pour maladie en cours de période haute, être réduit de la durée de cette absence, évaluée sur la base de la durée hebdomadaire moyenne de modulation applicable dans l’entreprise.
  • l’article 9.3 de l’accord prévoit « qu’en contrepartie d’un délai de modification des horaires inférieur à trois jours, dans le respect des plages d’indisponibilité, le salarié a la possibilité de refuser 3 fois sur la période de référence la modification de ses horaires, sans que ces refus ne constituent une faute ou un motif de licenciement ».
    Il est étendu sous réserve du respect des dispositions de l’article L.3123-12 du Code du travail. Celui-ci prévoit que le refus du salarié d’accepter la modification de ses horaires de travail ne constitue ni une faute ni un motif de licenciement dès lors que cette modification n’est pas compatible avec des obligations familiales impérieuses, avec le suivi d’un enseignement scolaire ou supérieur, avec l’accomplissement d’une période d’activité fixée par un autre employeur ou avec une activité professionnelle non salariée, etc.
  • l’article 14.1 prévoit les modalités de régularisation en cas de solde de compteur positif à l’issue de la période de référence.
    Il prévoit la possibilité pour le salarié de demander le remplacement de tout ou partie du paiement de ces heures par un repos compensateur majoré dans les mêmes conditions. En effet, les dispositions légales prévoient que les heures supplémentaires ouvrent droit à « une majoration salariale ou, le cas échéant, à un repos compensateur équivalent ».
    En revanche, l’article L.3123-8 du Code du travail prévoit que « chacune des heures complémentaires accomplies donne lieu à une majoration de salaire ». Il n’est pas possible de remplacer le paiement des heures complémentaires par un repos compensateur. Cette disposition étant d’ordre public, il n’est pas possible d’y déroger. Cet article est donc étendu sous réserve du respect de l’article L.3123-8.
  • etc.

Par conséquent, les entreprises de Sap de moins de 11 salariés ETP souhaitant appliquer l’accord de branche relatif à l’annualisation du temps de travail doivent respecter les réserves prévues par l’arrêté d’extension. Elles peuvent à la place, si elles le souhaitent, négocier un accord d’entreprise qui aura une application à durée indéterminée.

Pour rappel, dès lors que l’entreprise dispose d’un effectif supérieur à 11 salariés (ETP) ou conformément aux dispositions du présent accord, si un Comité social et économique (CSE) est mis en place, l’employeur devra négocier un accord d’entreprise sur le sujet de l’Aménagement du temps de travail dans les deux mois suivant l’élection. Par ailleurs, l’employeur peut, à tout moment, ouvrir des négociations pour la mise en place d’un accord d’entreprise sur le sujet.

Le service juridique de votre Fédération met à votre disposition tous les modèles de documents nécessaires à la mise en œuvre de l’aménagement de l’annualisation du temps de travail et vous accompagne dans la mise en application de l’accord de branche du 13 octobre 2016 ainsi que dans la négociation de votre propre accord d’entreprise sur le sujet.

Consulter l’accord relatif à l’aménagement du temps de travail du 13 octobre 2016 : https://urlz.fr/gdI4

Consulter l’arrêté d’extension : https://urlz.fr/gdI6